L'hôtellerie, à l'instar des notaires, des commerciaux, des Pompes Funèbres, des infirmières, aides soignant.e.s, est un métier de pure communication. Au cœur de la Comédie Humaine, aux premières loges des petites lâchetés, des démonstrations d'ego pathétiques, de mauvaise foi, de tentatives de séduction, de disputes de couples, ... Mais aussi de rencontres formidables avec des gens du monde entier, aux parcours fascinants, à la culture riche...
 
 
 
Voici quelques anecdotes drôles ou surprenantes qui me sont arrivées dans le cadre de mon métier de réceptionniste. Tout est vrai :)
 
 
Une nuit d'été, paisible comme un mois d'aout parisien, j'étais seul à l'hôtel. Lorsqu'un homme âgé, trimbalant un gros sac de sport, me demande une chambre. Il me paie 80€ et monte.
 
Au bout d'à peine 2 heures, il redescend. "J'ai trop mal au dos. Impossible de dormir. J'ai besoin d'aller marcher"
Il me demande s'il peut me laisser son sac. "Un officier viendra le récupérer"... 
Je range le sac dans notre salle technique, en ne me posant pas plus de question que ça..
 
Mais le client n'est pas revenu le lendemain. Personne n'est jamais revenu.
 
Au bout de 3 mois, ayant besoin d'un tournevis, je retombe par hasard sur le sac, couvert de poussière, que j'avais totalement oublié. Je décide de l'ouvrir. Il s'agissait de matériel photo haut de gamme : objectifs, boîtiers, trépied,pellicules.. 
Et, en dessous, bien enveloppé dans du papier journal, je tombe sur deux petits lingots d'or !

 

 

C'était la 1ère fois que j'en voyais. C'est petit, mais dense (lingot de 1 kg)  Chacun valait plus de 20 000 euros... (en 2007. aujourd'hui, plus de 40 000€...)

Le fait est que j'ai agi avec honnêteté, pour avoir la conscience tranquille : J'ai pris à témoin ma collègue le lendemain et j'ai ensuite remis à mon patron. Ce dernier m'avait affirmé que la police viendrait faire une enquête et "prendre des empreintes" . Mais ils ne sont jamais venus ! Je n'ai plus jamais eu de nouvelles de ces découvertes, mais je pense le patron les a tout simplement gardés pour lui.. Lorsque je lui ai demandé, le gérant à noyé le poisson de manière assez ridicule ("oh, c’était des faux. Les photographes s'en servent pour caler leur appareil photo" , sic)

A posteriori, je me dis que j'aurais du aller faire moi-même une déclaration au commissariat. Mais j'ai agis selon ma conscience. Ce type aurait pu être de la mafia, voulant planquer quelques temps le butin d'un hold-up et aurait pu facilement me retrouver.

Reste que, ni ce soir là, ni tous les autres, ne se présenta quelqu'un pour réclamer ses lingots.. J'aurais pu tranquillement les enterrer dans mon jardin et personne n'aurait jamais rien su.

 

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LES OBJETS OUBLIES

Je récupère aussi régulièrement des cartes de visite, des invitations ...





Un serre-tétons sm ..

 

 

LES URLUBERLUS SYMPATHIQUES :

 

Dernièrement, un individu est venu à la réception et m'a demandé s'il pouvait passer un coup de fil. 

Il a composé un numéro, puis s'est mis à discuter comme s'il parlait à ... Nicolas Sarkozy. 

Apparemment, ils étaient bons potes "Oui, on se voit dimanche etc.., je serai à l'heure mon Nicolas"

Sauf que le numéro ne fonctionnait pas. Il n'y avait personne au bout du fil...

J'ai pourtant fait comme si de rien n'était, amusé et il me donna même 50 centimes pour cette communication imaginaire. 

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Une nuit, deux types bourrés, qui se présentaient à moi comme des "amis" de clients, voulaient leur transmettre ce message ... C'est à peine écrit droit :)

Ce qui est amusant, est que l'on prend le message sérieusement et seulement ensuite on découvre l'absurdité de la chose.

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"Mister Blue"

 

Mister Blue, c’était quelque chose.. 

Un soir, un homme noir élégant débarque en boitant dans le hall désert de l'hôtel. Il est en costume bleu, tient une canne et boîte. Il me dit : "Bonsoir. Je suis Mister Blue"

> D'accord... C'est à quel sujet ?

Et là, il m'explique qu'il à un catalogue de nanas bimbos et de gigolos et que je devrais le montrer à mes clients et clientes pour qu'il choisisse son/sa préférée, en échange d'une commission d'environ 100€   

La prestation d'une heure de "pratique" était d'environ 600€     Je n'ai pas donné suite, mais il a marqué mon esprit.

Mister blue ressemblait à cela

 

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Le client schizophrène-paranoîaque

Pendant plusieurs mois, nous avons hébergé un client américain souffrant de schizophrénie, de paranoïa et de délire interprétatif. Mais jamais violent, chaque jour bien habillé en costume et cravate Hermés. Son obsession était de se faire embaucher dans les services secrets français.

 

Lorsque, au petit déjeuner ou au restaurant, un client engageait brièvement la conversation avec lui, il pensait s'être fait un nouveau trés bon contact. Il passait ensuite toute la matinée à écrire, à la main, plusieurs lettres racontant tous ses état de services imaginaires. Idem lorsqu'une personne au supermarché lui passait devant par erreur à la caisse : C’était un ennemi envoyé par le FBI ou la CIA pour le discréditer.

A la Réception, il nous disait "Il faut absolument que vous transmettiez cela à Monsieur Darmanin, ceci à Monsieur Macron ... C'est essentiel pour les relations entre la France et la Grande Bretagne"

 

Cela me faisait de la peine, car les autres clients le prenaient rapidement pour un urluberlu et me demandaient de couper le contact avec lui. Mais lui-même croyait dur comme fer à sa destinée et dépensait de l'argent inutilement en nuits d'hôtel, en restaurant.. Tout cela financé par sa pauvre mère depuis Miami. Trois fois par semaine, il se rendait au Quai d'Orsay ou au siège de la DGSE, la "Piscine" pour se faire embaucher. Il revenait évidemment bredouille, délesté entre temps de 60€ de taxi..  Il n'avait pas du tout rendez-vous, passé aucun examen préalable à une embauche..

 

Cet homme de 65 ans, brillant, parlant parfaitement 3 langues, vivait dans son monde et malgré nos tentatives les plus douces ou les plus directes, il fut impossible de lui faire entendre raison et comprendre qu'il ne vivait pas dans la réalité. Il venait d'une famille américaine trés riche originaire de Cuba et installée en Floride, avait fait de belles études de chimie à l'université d'Oxford, travaillé à la direction de grosses entreprises, fut champion de saut d’obstacles, voyageant dans les plus beaux hôtels du monde. Puis, en 1988, sa maladie mentale est survenue. Depuis lors, c'est à dire 35 ans, il fit 5 fuites de Miami à Paris, laissant sa pauvre mère handicapée dans une situation inextricable : Continuer à l'alimenter financièrement pour ne pas qu'il se retrouve à la rue à Paris et en même temps, tenter de mettre fin à cette folle fuite en avant..

Ses psychiatres parisiens le connaissait depuis 35 ans... Cependant, comme il n'aimait pas du tout prendre ses médicaments (lui faisant tout à coup réaliser qu'il vivait dans l’absurdité depuis des décennies) il n’était pas correctement traité. Tout ce qu'il recevait etait un somnifère.. Le niveau zéro de la médecine.  Aussi, c'était devenu un challenge pour moi d'essayer de lui faire changer son "mindset" (bien que l'écouter devenait vraiment fatiguant au travail)   J'avais construit une timeline pour le confronter à la réalité, au point de bascule d'avant/après. Cela le faisait réellement réfléchir, s’interroger, mais il n’était pas possible de le raisonner. J'ai compris que cela faisait partie des mystères du cerveau.

 

 

 

 

 

LES MOTIFS D'ANNULATION

 

J'ai aussi eu l'occasion de recevoir l'excuse d'annulation de réservation la plus insolite : Annulation "pour cause d'éruption volcanique" !

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 C’était tout à fait justifié (éruption du volcan Islandais eyjafjallajökull en 2010)

 

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LES DISPUTES DE COUPLES

Une nuit, une cliente américaine est descendue de sa chambre par l'escalier de service en hurlant. Elle est ensuite venue se cacher derrière mon bureau. Apparemment, son compagnon aurait été violent avec elle et elle semblait très apeurée. Ce dernier est arrivé en me racontant sa version (c'est une folle !) et je me suis donc retrouvé entre le marteau et l'enclume. Aussi j'ai décidé d'appeler la Police, qui a fait une enquête.

 

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LES TRAFIQUANTS DE DROGUE MEXICAINS 

Durant une semaine, nous avons hébergé à notre insu des trafiquants de drogue mexicains de calibre assez important. Ils voulaient voyager incognito dans notre 2 étoiles. Raté, car la brigade des stups les avaient repérés depuis l'aéroport de Roissy et nous a demandé de faire comme si de rien n'était, pendant qu'eux surveillaient leurs mouvements en se mettant en planque et en utilisant l'enregistrement vidéo.

 

LES ARNAQUES DE "PRO"

 

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Une femme vêtue d'un très beau manteau de fourrure réserve une chambre dans le 4 étoiles luxe où je fais un remplacement. Elle précise qu'elle souhaite absolument une chambre en rez de chaussée. Le soir du 2éme jour, elle déboule à la réception en hurlant "On a volé mon manteau de fourrure !  Je l'ai laissé dans la chambre quand je suis partie, vous pouvez vérifier sur vos cameras ! "  En effet, en visionnant les enregistrements, on pouvait voir que la cliente était rentrée dans sa chambre AVEC le fameux manteau, puis ressortie en le laissant à l'intérieur. Il a donc fallu lui rembourser le double de la valeur du manteau, comme le stipule les garanties vol des hôtels haut de gamme. 

Cependant, après enquête, on découvrira que la cliente avait demandé le rez de chaussée pour une bonne raison : Une fois dans sa chambre, elle n'avait qu'à ouvrir sa fenêtre pour balancer son manteau à un complice et ainsi, faire croire au vol ! Heureusement qu'une audition de témoin a permis d'écrouer cette personne malhonnête.

Ce métier vous apprend à ne surtout pas se fier aux apparences. Le cas de Madame Muller l'illustre bien : Avant de se faire définitivement griller, cette femme trés bien habillée, à la trés bonne élocution, trés courtoise, assurée, a arnaqué 6 hôtels du quartier de St Germain des Prés (Paris 6éme

 

 

Sa technique était plutôt bien rodée : En arrivant, elle donnait sa carte bancaire pour que l'on fasse une empreinte de la 1ére nuit (200€) Et ça passait. Ensuite, le vendredi soir, juste avant le weekend, elle demande à étendre son séjour et propose de faire un virement.

Elle présente ensuite un faux document de banque conçu sous word, mais suffisamment bien fait pour tromper. Comme c’était le weekend, l'hôtel s’aperçoit seulement le lundi ou mardi qu'aucune somme n'a été versée. Et la Madame Muller est déjà partie .. En réalité, cette cliente ne payait qu'une nuit et en restait 4. Elle laissait juste 200€ sur son compte bancaire pour qu'une empreinte passe et donne confiance.

 

LES FLAMBEURS BIDONS

Ce sont ces commerciaux ou politiques de second rang, qui, pour impressionner leurs assistantes (toujours choisie pour leurs physiques.. ) se proposent de venir dans leur chambre avec du champagne (sic)  Ça picole, ça rigole. Sauf que le matin, quand , à froid, il s'agit de payer , il n'y a plus personne, ça n'assume pas. Sans la vigilance de la Réception, ils ne diront pas qu'ils ont consommé. Pourtant, la note est là, salée.

 

LES BAGAGES

Voilà ce que ça donne, en terme de bagages, lorsqu'un couple d'Australiens ayant vécu 4 ans à Paris, repart à Melbourne :)

 

 

 

LES MOMENTS DE STRESS

 

Je me souviens d'un soir horrible où l'hôtel était plein , mais suite à un bug informatique, les gens pouvaient continuer à réserver.. Du coup, je me retrouvais en surbooking. Les clients arrivaient après une longue route et je devais leur dire que je ne pouvais pas les recevoir. J'ai vraiment fais le maximum pour les reloger, mais en plein mois de Juin, il arrive qu'il n'y ait plus une chambre de libre dans Paris (rares périodes, comme Roland Garros) 

J'ai maudit ma Direction ce soir là, car c'est moi qui ait pris toute la colère des gens.

 

Quand je travaillais la nuit, j'ai appris à faire preuve de beaucoup de vigilance. Il suffit de quelques instants pour se faire surprendre et de mettre sa sécurité ou celle de l'hôtel en danger. Une nuit, je suis descendu moins de 5mn aux toilettes , en oubliant de fermer la porte d'entrée. Quand je suis remonté, j'ai halluciné : Un clochard en avait profité pour s'installer sur le canapé du hall. Il diffusait une odeur sincèrement insupportable. Mais ce n’était pas tout : Un autre client était à la réception. Son épouse était malade, en train de vomir.  Puis le téléphone sonne : Plus de chauffage dans une chambre... Tout en même temps ! Et ce n’était pas des petites choses à régler, comme fournir une serviette supplémentaire... Une fois dans leurs chambres, les clients deviennent de grands enfants, comme incapables de se gérer eux-même..

Dans ces cas là, j'ai appris à prendre sur moi, calmement, à relativiser et prendre chaque problème , les uns à la suite des autres, en fonction de l'urgence. D'abord, appeler SOS Médecin. Ensuite, monter un chauffage d'appoint temporaire. Enfin, appeler la Police pour faire sortir le clochard qui s’était entre temps allongé et endormi, puis le 115, pour l'emmener en hébergement d'urgence.

 

 

LES MOMENTS SYMPAS

Deux jeunes filles sont venues me remettre un "diplôme" de Mac Gyver après leur avoir donné un coup de main pour récupérer leur carte Navigo, tombée au fond d'une bouche d’égout !  Avec un long bâton fin, un chewing-gum collé au bout et une lampe torche :)

Anecdotes d'hôtel
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